Le Monde - En 2016, une électricité 100% verte pour éclairer les rues de Paris

En présentant, jeudi 12 novembre, à moins de trois semaines de la conférence mondiale sur le climat (COP21), un plan « inédit » pour la transition énergétique de Paris, la maire, Anne Hidalgo, veut une nouvelle fois montrer que les villes constituent des acteurs clés de la lutte contre le réchauffement de la planète. Et qu’elles agissent.

Parmi les mesures phares, dès 2016, l’ensemble des bâtiments municipaux et l’éclairage public de la capitale seront alimentés par une électricité 100 % renouvelable. Amenée, avec la fin des tarifs réglementés de vente d’électricité le 1er janvier 2016, à renouveler l’ensemble de ses contrats, la Ville de Paris exigera désormais de ses fournisseurs une électricité verte.

Origine verte garantie

« Par la commande publique, les villes peuvent activement contribuer à l’essor de la filière des énergies renouvelables », assure Célia Blauel, adjointe (EELV) chargée de l’environnement et du développement durable. La Ville, pour ses infrastructures, dépense aujourd’hui 32 millions d’euros pour une consommation annuelle de 282 gigawattheures.

EDF et Direct Energie, les deux entreprises retenues par la municipalité parisienne, se sont engagées à fournir une électricité produite à partir d’énergie hydraulique, solaire et éolienne. Elles devront garantir cette origine à travers des certificats homologués. Le courant électrique cheminant sous forme d’électrons dans les fils, il n’est en effet pas possible de distinguer un électron « vert » d’un autre électron. Pour justifier auprès de son client que l’origine de l’électricité qu’il consomme est bien verte, un fournisseur doit alors démontrer qu’il produit à l’aide d’énergies renouvelables une quantité d’électricité supérieure à la consommation de son client.

Une facture allégée

Ce choix fait par la Ville d’une électricité 100 % renouvelable participe à la diversification de l’approvisionnement énergétique de la capitale, dont le Plan Climat Energie, défini en 2007, prévoit d’atteindre au moins 30 % d’énergies renouvelables d’ici à 2020. La politique de modération de sa consommation électrique que Paris mène en parallèle a aussi été accentuée depuis deux ans. Actions de sensibilisation des agents, choix d’équipements performants dans le cadre des programmes de rénovation, signature de contrats de performance énergétique avec les écoles : fin 2014, la consommation annuelle de la capitale affichait déjà une baisse de 10 % par rapport à 2012.

Passé de 36,3 millions d’euros à 32 millions d’euros au cours des deux dernières années, sa facture d’électricité devrait encore s’alléger. D’autant que, pour la première fois, la Ville a procédé à un groupement de commandes associant la commune et le département de Paris, ainsi que le centre d’action sociale de la Ville de Paris et l’établissement public Paris Musées. Au total, la municipalité a obtenu, fiscalité comprise, des prix inférieurs de 6,5 % par rapport aux précédents contrats, soit une économie de 2 millions d’euros. Et ce passage à l’électricité verte doit permettre à la Ville, selon les fournisseurs, de réduire de 20 000 tonnes ses émissions de CO2, qui atteignaient, en 2012, pour son patrimoine, 269 000 tonnes.

Tout en qualifiant de « geste fort » l’achat par Paris d’une électricité 100 % verte, Anne Bringault, du Réseau action climat et du Réseau pour la transition énergétique, invite la capitale à tendre ensuite vers 100 % d’énergies renouvelables. Et elle appelle la municipalité à « renforcer cet acte de consommation par un acte de soutien à la production d’énergies renouvelables locales en Ile-de-France ». « Comme Francfort, insiste Mme Bringault, Paris pourrait engager un travail plus approfondi pour évaluer, d’ici à 2050 par exemple, les besoins en énergies renouvelables de tout son territoire et le périmètre nécessaire autour de la ville pour produire cette énergie. »

Transition énergétique

Si la municipalité parisienne ne va pas encore jusqu’à se fixer un objectif de 100 % d’énergies renouvelables, elle entend néanmoins réintroduire la production d’énergie sur son territoire. Aujourd’hui en effet 90 % de l’énergie parisienne est importé de territoires autour de la capitale. Cette reprise en main passe par le développement des énergies renouvelables et de récupération

La Ville va ainsi multiplier les panneaux solaires sur ses bâtiments pour alimenter en eau chaude et électricité leurs occupants. Elle entend aussi recourir à la géothermie et à l’hydrothermie et ainsi capter l’énergie du sous-sol ou de cours d’eau (Seine, réseaux d’eau potable et non potable) pour alimenter les réseaux de chaleur et de froid d’immeubles. La Ville va aussi développer des systèmes de récupération de la chaleur produite par les data centers ou encore par le flux des eaux du réseau d’égouts.

La municipalité a déjà constitué une liste de 25 premiers sites qui vont faire l’objet de tels aménagements. Par exemple, l’eau des bassins de la piscine de la Butte aux Cailles dans le 13e arrondissement sera d’ici à quelques mois chauffée grâce à l’énergie dégagée par les serveurs informatiques d’un data-center en cours d’installation dans le quartier. Et dès cet hiver, l’Hôtel de ville sera lui-même chauffé par les eaux chaudes du réseau de chauffage urbain, de celui des eaux usées et des circuits de refroidissement.

« Désormais nous entendons recourir partout où c’est possible aux ressources du territoire », insiste Anne Hidalgo, qui souhaite que dans cette « stratégie radicale d’accélération de la transition écologique et énergétique de Paris », les bâtiments publics soient « exemplaires ».

Laetitia Van Eeckhout
Journaliste au Monde

publié le 10/10/2019

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